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Alors, face à la frénésie spirituelle de l'Occident: 

Bouddhamania ou Dalaïmania...?

Copyright © Sâdhana

Jeboud.gif (16697 octets)Il est certain que l'Occident a un immense besoin de spirituel (à ne pas confondre surtout ni amalgamer avec religiosité) dans le sens où spirituel signifie prise de conscience de la Globalité de tout être humain, incluant âme, corps, esprit ainsi que celle de l'interdépendance de ceux-ci, par le biais de la connaissance des mécanismes du mental. C'est pour cela qu'abordant le Bouddhisme, il est capital d'effectuer cette approche selon des canons bien précis et surtout selon un processus progressif et solide parce que structuré. Les trois Confiances, les quatre Nobles Propositions essentielles, les cinq Agrégats, les six Paramitas, l'Octuple Sentier, les dix Préceptes majeurs, les dix Liens, les douze Chaînons et bien d'autres bases essentielles doivent être parfaitement assimilées et intégrées dans le sub- et l'in-conscient pour que tout apport successif puisse cohabiter harmonieusement avec ce qui a été ingéré auparavant, sans créer a posteriori déséquilibre et perturbation nuisibles à l'évolution de l'esprit.

Il faut honnêtement reconnaître que l'Occident, après avoir fait les doux yeux aux "swamis" et à la vague hindouisante dans les années 50, s'est jeté à corps perdu, mu par un élan tout "soixantehuitard", dans l'Océan du "Peace and Love", toujours à connotation éminemment orientale, quitte à y contracter une "gourouïte" des plus aiguës. Ceci, en oubliant, avec une inconstance presqu'infantile, la modération et l'anti-extrémisme, pierres angulaires du Bouddhisme dans sa tradition de la Voie du Milieu, telle qu'elle lui fut révélée par des grands maîtres cingalais, thaïs, birmans, vietnamiens, coréens, japonais et même tibétains ... A tel point qu'on a pu voir éclore une multiplicité de groupuscules sectaires ou de mouvements se diversifiant en une gamme étoffée de doctrines, allant de la sérénité la plus parfaite au délire mystico-paranoïaque ou apocalyptico-gazéifiant.

Qu'en plus, n'abandonnant nullement son "cartésianisme dissécateur", l'Occident est en train de recréer, avec les divers courants de la pensée bouddhique, les mêmes clivages (anti..?) religieux, qui ont progressivement sapé la cohérence et la cohésion de son unité spirituelle. En Orient, ce clivage existe d'une manière moins tangible, les uns et les autres vivant dans une Sangha (communauté religieuse) apparemment respectée, respectable et respectueuse (ceci tant qu'il n'y pas d'ingérence du pouvoir comme ferment de rivalité - ce qui existe dans le cadre des religions d'états - ou du pouvoir conféré par la Succession).

Il serait à suggérer que l'Occident, inéluctablement marqué qu'il est par son passé, veille à ne pas réitérer par quelque dérapage confus de ses " méninges " dans une aspiration spirituelle juste et louable, les même schémas qui l'ont induit, tout au long de son histoire religieuse, dans des schismes douloureux, surannés, mais vivaces. Les rivalités sous-jacentes entre "chapelles intégristes" ne demandent qu'à se r'Éveiller souvent intempestivement. 

Par trop pressé dans sa quête de changement spirituel, ébloui qu'il est par la chatoyance visuelle et sonore de certains rituels et pratiques, l'Occident ne remarque même pas qu'il retombe, tête baissé, la majeure partie des cas dans la répétition d'analogues schémas de dépendance à l'égard du transmetteur de la " vérité " et  aux rituels y afférents; schémas qu'il reprochait auparavant à ses propres institutions religieuses qu'il veut ou vient de quitter; ne serait-ce pas finalement un peu de Charybde ou Scylla...?

Un des grands maîtres tibétains mettait en garde l'Occident contre le fait suivant: montrer le chemin authentique n'attire personne; par contre, se mettre en valeur ou exagérer un peu, essayer de manipuler font se précipiter des foules [qui ne demandent qu'à se faire (illusoirement) prendre en charge spirituellement, ceci en totale contradiction avec les enseignements bouddhiques]. La paresse et l'impatience font bon ménage et certains "petits futés" n'attendent que l'occasion fournie par la "vogue spirituelle" pour endormir la vigilance des gens dans une société où le "Toutoutd'suite", à l'image du "Dieu Argent", règne en maître incontesté.

Même dans un secteur comme celui du spirituel, la différence entre un authentique " bénévolat ", parfois missionnaire et l'attraction du " business " est souvent difficile à discerner. C'est justement, dans ce créneau spirituel, que la demande impatiente et souvent incohérente de l'Occident fournit à des maîtres moins compassionnels et discernants, " little feet gourous " de mouvements à tendance plus ou moins sectaire, l'occasion de se remplir les poches, profitant du désarroi de consciences désenchantées ou déséquilibrées. Ceci est valable pour toutes formes de spiritualités, aussi bien occidentales qu'orientales. Ce même maître avait très bien compris le problème de l'incohérence de l'Occident:

Boudha37.GIF (22598 octets)"Je suis venu pour voir les moines, mes compatriotes et coreligionnaires bouddhistes et leur enseigner le bouddhisme tibétain. Or, vous, chers amis occidentaux, vous n'êtes ni mes compatriotes, ni mes coreligionnaires ! Donc, je ne puis vous enseigner le bouddhisme tibétain... Par contre, les paroles du Bouddha vous concernent tous et c'est le seul enseignement que je puisse authentiquement vous dispenser."

Il est impératif que, dans les soubresauts épidermiques ou paroxystiques agitant le "méga-souk du spirituel business " ou le " lèche-vitrine d'un fast-food spirituel " de ce début de IIIè millénaire, le Bouddhisme ne devienne pas un  " lèche-vitrine exotiquement spirituel "  ou une spiritualité " à la mode " dans un " bricolage intellectualisant ", consommable et/ou consumable, en raison de la tendance à se faire piégé par une sur-médiatisation, " diffusion tous azimuts ",  à l'occidentale; du fait aussi, que le Bouddhisme pourrait, parfois, représenter une possibilité éventuelle de " refuge " ou de pseudo-prise en charge spirituelle pour ceux qui se révoltent passagèrement ou définitivement contre une tradition hiérarchique religieuse trop pesante et pensante ou qui désirent se convertir à une nouvelle religion.

Enfin, parce qu'offrant trop facilement et souvent, pour certains, une forme d'évasion dans une fuite de sa propre réalité quotidienne pour aboutir dans une tentative de prise en charge, non par soi-même, mais par un " directeur de conscience ", semblable à ceux qui fleurissaient à l'époque de Bossuet; prise en charge soumise à toutes les potentialités d'aliénation inhérentes qui font trop souvent totalement fi du respect de l'intégrité et de la responsabilité de l'individu.

Le Bouddhisme est une magistrale école de la prise de conscience de l'Être et de sa responsabilité, de sa mise en oeuvre et de sa compréhension. C'est actuellement la seule spiritualité qui peut mettre un terme à deux millénaires " d'assistanat spirituel horizontal " en conférant à l'Homme sa " verticalité responsable ".

Il faut que l'Occident, possédant un inconscient collectif différent de celui oriental, sous-tendant cette philosophie, inconscient qu'on ne peut demander ni à l'un ni à l'autre de transmuer en lieu et place de son alter ou de son ego, sur le champ comme par enchantement, ne tombe pas dans ce leurre de la pseudo-imitativo-substitution immédiate. Si ce phénomène d'osmose d'Inconscients doit se faire, il se fera; mais cela prendra du temps, beaucoup de temps; l'important est, sans altérer et voiler sa nature propre, sans se laisser déborder par des flots incontrôlables ou dérapants de mysticisme " hyper-bien-intentionnés ", d'authentiquement, essentiellement et sereinement participer à cette progression dans la VOIE, celle de notre vie quotidienne.

 Rompre avec toute activité, se retirer du monde ne prouve ni grande sagesse, ni vertu. L'homme parfait doit être capable d'aller et venir comme le commun des mortels " Tchouang Tseu

 " L'intelligence est la capacité par laquelle nous savons répondre justement
à de nouvelles situations en fonction de nos expériences passées"

(vén. Shinjin)

" la Sagesse consiste à accueillir l'inattendu avec équanimité "
(vén. Shinjin)
 

vén. Shinjin Robert Brandt-Diény tient à affirmer avec une sereine et rigoureuse véhémence que:

Le Bouddhisme ne peut et ne doit en aucun cas être pour et dans l'Occident
une nouvelle religion à caractère prosélyte et illusoirement théiste,
qu'on ne s'y méprenne pas.

Il est et reste une tradition religieuse propre à l'Orient.
Par contre, en Occident, il se révèle être une remarquable méthodologie philosophique
pour une meilleure prise de conscience de ses propres racines spirituelles dans une " Voie de vie " se situant au-delà des religions instituées, dogmatiques et hiérarchisées.

voir Kalama soûtra

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Concernant le Vajrayâna, actuellement, en Occident la forme la plus diffusée et la plus prisée du Bouddhisme étayée qu'elle est par à une certaine Dalaïmania (terme trouvé dans l'Actualité des religions 4/99), vén. Shinjin Robert Brandt-Diény tient à souligner avec fermeté empreinte de sérénité que celui-ci, par le biais de ses différentes traditions, ne représente qu'un parmi les multiples moyens d'accession à la Sagesse, ceci au même titre que le Therâvada ou le Mahâyâna, dont il est pourtant partie intégrante comme se plaît à l'affirmer, encore récemment, le Dalaï-Lama (qu'il avait le privilège d'interviewer en tête à tête le 2 octobre 1973, à Genève, lors de son premier voyage européen). A son sujet, il est à préciser qu'il est considéré comme la réincarnation d'Avalokiteshvara (Chenrézigs) qui est un bodhisattava et que le Panchen-Lama (ou Tachi-Lama) est, par contre lui, la réincarnation d'un bouddha, en l'occurence Amitâbha (le bouddha de la lumière infinie). 

Le Dalaï-lama, contrairement à une idée préconçue et fortement répandue, ne peut en aucun cas être assimilé au " pape " du Bouddhisme, tout auréolé et médiatisée qu'il est auprès de l'Occident par son Nobel de la paix 1989, puisqu'il ne représente qu'un pourcentage minime de la totalité des pratiquants " bouddhistes indigènes " et qu'il n'est pas reconnu comme "chef " spirituel parmi les théravâdins sri-lankais, thaïlandais, birmans, cambodgiens, laotiens, les mâhayânistes  Zen et Terre-Pure chinois, coréens, japonais, vietnamiens et les tibétains eux-mêmes des 3 autres écoles bouddhiques, la lignée Kagyu ayant comme chef spirituel le Karmapa, actuellement le 17è. Donc, il n'est que le chef temporel de la lignée guélugpa, et non spirituel (titre dévolu au seul panchen-lama) , comme cela est galvaudé trop fréquemment dans une ignorance totale de la hiérarchie spirituelle tibétaine, fort complexe d'ailleurs.

Nonobstant toute l'estime et le respect qui sont dus à sa campagne de sensibilisation méritoire à un " génocide ethno-religio-cuturel " et à lui-même en tant qu'homme, il est avant tout le porte-parole politico-religieux d'un pays confronté à de douloureux problèmes avec son voisin chinois et ne peut se prévaloir de " représenter " à lui seul le Bouddhisme dans son entièreté. Le livre " Bouddhisme et Occident " de Lionel Obadia analyse fort bien ce phénomène. Ensuite, les nombreux témoignages des exactions des autorités chinoises, durant et après la Révolution culturelle, à l'encontre du peuple chinois, lui-même, comme par exemple dans les fameux Lao Gaï dénoncés par Harry Wu, démontrent que les tibétains ne sont pas les seuls à souffrir de ces violations des droits de l'Homme les plus élémentaires, ce à l'encontre aussi bien d'éminents intellectuels et scientifiques qu'à celle des pauvres orphelins et nouveaux-nés...

Nombreux sont les moines bouddhistes, dans d'autres pays qui sont persécutés, torturés, assassinés, sans qu'on amalgame pour autant, dans une confusion touchante et spontanée,  la politique et le religieux, à défaut de spirituel. Il est impératif de dissocier honnêtement, ce qui est du ressort de la politique et ce qui est du ressort de la religion, a fortiori quand celle-ci se recommande du Bouddhisme, vu que celui-ci s'est voulu, dès le départ, foncièrement apolitique. 
(Si des personnes s'étonnent ensuite de voir sur différentes pages du site des illustrations, des textes et rituels tibétains, qu'elles n'aillent pas penser un seul instant que nous le faisons sous couvert d'hypocrisie auto-justifiante ou déculpabilisante, Non, telle n'est pas notre intention)
Notre tâche première est de fournir des informations éclectiques aux Internautes, mais avec toute la rigueur requise face à des amalgames "exaltés", d'où ces précisions clarifiantes à l'appui.)

Il faut aussi différencier au sein de ce dit  " bouddhisme tibétain ", d'une part, des Enseignements de base  communs aux trois véhicules et d'autre part les pratiques "magiques", (apanage d'un lamaïsme) pratiques favorisées par un contexte propice, à savoir le religion Bön et l'héritage de l'Hindouisme, préexistant à l'arrivée au Tibet d'un Bouddhisme tardif, il va s'en dire puisque 1'000 après la mort du Bouddha. Il est notoire que l'Occident, tout imbibé qu'il est encore d'un christianisme passablement vivace, a fait le meilleur accueil à ces " missionaires Vajrayâna " du Bouddhisme, débarqués dès 1960, suite à l'invasion du Tibet en 1959 ou venus sur invitation, tout comme le furent aussi d'ailleurs des moines théravâdins et zen de renom.

Ces Pratiques, connues sous le terme de "moyens habiles et salvifiques", réservées à des personnes ayant acquis des niveaux de conscience, sans aucune commune mesure avec ceux d'un occidental profane, sont susceptibles, fréquemment, de perturber l'inconscient individuel et collectif de celui qui " s'amuse par curiosité à essayer "; ce justement en fonction d'une " hâte spiritualisante ", préjudiciable à la compréhension correcte de leur essence particulière. 

Cependant, l'Occident recherche, avec une frénésie mal contenue, le côté " magique " du Tantrisme, frustré, culpabilisé, qu'il a été par les sacro-saintes traditions ecclésiastiques occidentales, de vouloir accéder à la Connaissance. Mais, il nage dans la plus parfaite ignorance, à savoir que le Tantrisme, ne concerne pas uniquement la sexualité (comme cela est trop souvent galvaudé), mais un ensemble de pratiques mûrement élaborées et sérieusement transmises de génération en génération, pratiques permettant de concrétiser l'interrelation entre les différents plans (corps, âme, esprit) et les énergies cosmiques. La première, commune à toutes les écoles, est de pratiquer une respiration consciente.

vén. Shinjin Robert Brandt-Diény a constaté qu'un nombre croissant de personnes sont attirées par le rayonnement diffuseur et l'aspect, séduisant parce que mystérieux, des " pratiques et initiations " du bouddhisme Vajrayâna et lamaïsme tibétain; aspect offrant, à ce qu'il en est dit, la possibilité d'accéder plus rapidement au " Nirvâna " que le Théravâda et même que le simple Mahâyâna.

On pourrait croire que ce " véhicule " convient mieux à une société en quête d'un " fast-food spirituel ", fascinée qu'elle est par ce côté attrayant de " Bouddha building ". Ces vues sont erronées, parmi tant d'autres que notre société occidentale " speedée et compétitionnée " à outrance se plaît à échafauder et " véhiculer " avec toutes les illusions et désillusions inhérentes. vén. Shinjin Robert Brandt-Diény tient à se démarquer de toutes conceptions, affabulations et déductions hâtives. Il insiste sur l'importance et la nécessité des facteurs calme, patience et longueur de temps dans quelque approche bouddhique que ce soit. Enfin, au travers de tous ces appels oraux ou écrits reçus régulièrement, marques d'un engouement indéniable souvent fort authentique, il en est arrivé à la conclusion qu'ils étaient révélateurs d'un phénomène socio-culturel, consistant principalement en un processus réacto-échappatoire très tentant, se posant ainsi en contre par rapport au rigorisme d'une morale "culpabilisauto-justificative/trice", processus découlant d'un malaise général pour l'orienter vers un exotisme lénifiant et apaisant.

Il est vrai que de plus en plus de personnes sont subjuguées par les clichés-concepts, issus de la fascination qu'exercent les Tibet, Ladakh, Zanskhar, Bouthan, Népal et Mongolie, parmi d'autres contrées asiatiques ...  et tout imprégnés de dépaysement spirituel. Mais cette subjugation va de pair, trop souvent hélas, avec une profonde méconnaissance de ce monde spirituel, exaltant parce que nouveau ou l'inverse, avec les nombreux a priori y découlant.

Il apparaît qu'au départ, déjà, il y aurait une erreur d'appréciation quant aux sacrifices de tous ordres qu'exige tout chemin spirituel. Qui dit fascination sous-entend débordement, aspiration immodérée. En fait, il semblerait que beaucoup de personnes brûlent, en toute sincérité innocente et méconnaissante, les étapes, voulant déjà admirer le panorama bouddhique du 13è étage alors que la cage de l'escalier n'est même pas en cours de construction

Il semble compassionnel et judicieux de les prévenir avant qu'elles ne se consument elles-mêmes dans les mirages de leur mental, aveuglées qu'elles sont par l'éblouissante beauté du royaume spirituel (cf. S.Peck) un peu à l'image des phalènes attirées par la source de lumière des lampes auxquelles elles se brûlent.

vén. Shinjin Robert Brandt-Diény tient à préciser, tout particulièrement, que toutes les divisions, postérieures à l'enseignement du vivant du Bouddha, vont à l'encontre même de l'Esprit réunifiant du Bouddhisme dans le sens où elles suscitent une tentation de suprématie et d'hégémonisme fondés sur une interprétation personnelle de tel ou tel point de doctrine de l'Enseignement du Bouddha. Elles créent la Dualité dans laquelle l'Intolérance peut s'y donner à coeur joie et l'on voit même çà et là, dans diverses ramifications pseudo- et bouddhiques, refleurir les sempiternelles et horribles maximes, telles: "Hors de ... point de salut possible;  sans tantrisme, point d'Eveil ...! ".

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